Les insectes: nos protéines de demain?
Avec plus de 9 milliards de bouches à nourrir d’ici 2050, sans compter les animaux d’élevage, le besoin de protéines va doubler alors que certaines sources conventionnelles, comme les stocks de poisson de mer, s’épuisent. Face à cette situation, les insectes sont envisagés comme une source avantageuse de protéines alternatives pour l’alimentation humaine et animale.
Valeur nutritionnelle élevée
Les insectes tels que le ver de farine ou le grillon ont une qualité protéique comparable à la viande et sont riches en acides gras, fibres, vitamines B et oligo-éléments (cuivre, fer, magnésium, sélénium, zinc …).
Respect de l’environnement
L’élevage d’insectes nécessite peu de ressources, contrairement à l’élevage intensif de bétail. Les insectes ont un taux de conversion alimentaire élevé (1kg d’aliments pour 1kg d’insectes contre 8-10 kg pour 1kg de bœuf), peuvent être nourris de coproduits organiques, dégagent 10 à 100 fois moins de gaz à effet de serre, nécessitent peu d’eau et sont nettement moins dépendants du sol que le bétail conventionnel (28 m² suffisent pour produire 5T de vers de farine/an).
Indépendance alimentaire
Les importations européennes de soja ont quintuplé en 50 ans pour les besoins de l’élevage de bétail. Grâce à la production locale d’insectes, l’UE pourrait peu à peu s’affranchir du « modèle soja », promouvoir une production plus locale, exempte d’OGM et moins polluante. L’enjeu est d’optimiser les élevages d’insectes pour obtenir des prix de revient compétitifs par rapport aux substituts conventionnels.
Insectes et nutrition humaine
Si la consommation d’insectes est courante en Afrique ou en Asie, elle ne l’est pas dans notre culture. Une série de produits à base d’insectes ont récemment émergé, mais le marché n’est pas prêt : l’idée de consommer des insectes doit faire son chemin chez les consommateurs, ce qui pourrait prendre des années.
L’industrie développe actuellement des procédés pour isoler la fraction protéique des insectes et en faire une poudre concentrée pouvant être intégrée aux préparations dans le but d’une meilleure acceptabilité par les consommateurs réticents, mais les coûts d’extraction restent prohibitifs.
Par ailleurs, si l’analyse nutritionnelle des insectes conclut à leur adéquation théorique aux besoins humains, l’effet de leur consommation régulière sur la santé des populations occidentales n’a pas été suffisamment étudié. Le principe de précaution prévaut donc au niveau de l’UE qui, par un règlement applicable aux états membres depuis le 1er janvier 2018, considère tous les insectes et leurs produits dérivés comme des « ingrédients nouveaux » soumis à autorisation avant mise sur le marché.
La Belgique, qui admettait la commercialisation de 10 espèces d’insectes sur son territoire depuis 2014, ne tolère désormais plus que 3 espèces pour lesquelles les demandes d’autorisation européenne ad hoc ont été introduites: le ver de farine, le grillon et le criquet, et les préparations à base de ces insectes (farines, pâtés…).
Insectes et nutrition animale
L’intérêt écologique et économique des insectes dans l’alimentation des poissons, porcs et volailles est énorme. Malheureusement, la réglementation européenne n’autorise pas encore l’utilisation de produits à base d’insectes dans l’alimentation des animaux d’élevage destinés à la consommation humaine, en dehors de l’aquaculture. Elle devrait toutefois évoluer favorablement à brève ou moyenne échéance.
Et le bio?
La règlementation bio européenne ne couvre pas encore la production d’insectes, mais le Collège des Producteurs wallons a d’ores et déjà établi un cahier des charges pour l’élevage bio du ver de farine même si, actuellement, aucun élevage n’a obtenu la certification.
Sur le marché humain, certains produits transformés contenant maximum 5% d’insectes ont pu être certifiés bio par le fait que 95% des ingrédients étaient bio.
Sur le marché animal, la production locale d’insectes bio permettrait de sécuriser l’approvisionnement en matières premières de la filière d’élevage bio de porcs et volailles. Cette filière souffre d’une disponibilité insuffisante de matières premières pouvant valablement intégrer le régime de ces animaux. L’élevage bio réclame en effet non seulement des aliments 100% bio mais, également, dotés d’une identité locale. C’est relativement simple pour les céréales, mais plus compliqué pour les aliments protéinés, généralement onéreux et issus de sources éloignées des zones de production wallonnes.
Sources : FAO, AFSCA
Hélène Wacquier